Il y quatre ans, je découvrais pour la première fois la maison qui allait devenir mon plus paisible ancrage, et à quelques mètres à peine de sa lourde porte d’entrée en bois, une cour abandonnée ressemblant davantage à une mini forêt vierge qu’à un jardin. Pourtant, je me souviens précisément de l’émotion qui m’a assaillie le cœur en découvrant ce petit espace sauvage, déstructuré, abandonné par ses propriétaires depuis plus d’une dizaine d’années.
Certaines personnes ne parviennent pas à se projeter face à ce genre de chaos. Que cela concerne un lieu d’habitation ou un espace extérieur, il faut pouvoir ressentir un endroit, écouter ce qu’il a vécu, ce qu’il peut offrir, s’imprégner d’ambiance et de lumière et rêver de ce que l’on imagine pouvoir créer avec ce qui s’offre.
Sous ces branches enchevêtrées et cette verdure un peu folle se dissimulait une dalle en béton recouverte au fil des ans par un amoncellement de feuilles mortes. C’est sur ce terreau que toutes sortes d’herbes et de plantes avaient poussé, donnant l’illusion d’un sol en terre battue qui ne demandait qu’a être simplement désherbé. Et à vrai dire, au moment de la visite peu m’importait… Le mazet encombré avec son toit en partie effondré, la vigne reposant sur de vieux tubes métalliques rouillés dessinant une improbable treille, le muret de pierres sèches en partie éboulé empêchant tout accès au grand figuier en surplomb, tout m’avait semblé charmant… Cette petite cour dissimulée aux regards, toute enveloppée de verdure, son calme et la lumière délicate filtrant à travers les feuillages m’avait séduite et j’avais eu presque immédiatement en tête la façon dont j’allais réorganiser l’espace tout en préservant le cachet et l’âme des lieux.
Sur la photo suivante, on distingue à peine le petit plateau qui mène à un second terrain dont j’ai pu faire l’acquisition un peu plus tard et qui attends que je lui offre le temps et la force nécessaire pour retrouver à son tour une âme.
Que de mois de travail pour illuminer cet espace… Désherber, défricher, restructurer. Remonter le mur. Créer un escalier. Recycler la terre de la troisième cave qui se trouve sous le terrain juste à côté et créer des espaces de plantation. Casser une partie de la dalle en béton. Habiller une autre partie de carreaux cassés trouvés sur place. Monter de petits murets pour réutiliser l’impressionnant volume de pierres jonchant le petit plateau juste au-dessus. Semer. Planter.
Et puis voilà… Peu à peu, plantes et arbustes ont trouvé leur place. Quelques grimpantes, des méditerranéennes, se sont installées tranquillement et finalement, tout pousse. Il reste cependant tant de choses à faire…
Le petit mazet a retrouvé un toit qui le protège des intempéries et il me tarde l’été prochain pour travailler ses murs, les réparer, jointer ce qui n’existe plus à la chaux, et meubler l’ensemble sobrement pour lui donner une fonction chaleureuse. Mais tous ceux qui passent dejà entre ces murs et qui profitent de ce jardin disent la même chose : il est apaisant.
On ne peut jamais savoir ce que notre horizon nous ouvrira. Pour le moment, le mien me mène à cet espace qui me rassure et répare doucement tout ce qui s’est brisé à l’intérieur de mon âme au cours de ces dernières années. C’est un lieu vrai, réel, qui ne triche pas. Toujours présent, vivant, quelque soit la fluctuation des émotions, il ne disparait pas…
Face aux abandons et aux silences douloureux auxquels nous sommes parfois bien tristement confrontés, l’ancrage à un lieu que nous aimons, bien que très symbolique, reste infiniment précieux.
4 Commentaires
Bonjour Nathalie, du fouilli du départ, c’est un jardin bucolique que vous avez façonné où il doit être bon de se poser pour juste rêvasser et respirer. Il m’inspire l’apaisement et la protection. J’ai toujours plaisir à vous lire même si je ne commente pas. Bonne journée,
Sabine
Sabine : Vous avez parfaitement ressenti ce que ce lieu inspire… Et si le sentiment de protection s’ajoute à l’apaisement, ne serait-ce qu’en visualisant ces images, le projet de réhabilitation de ce lieu est une réussite. Merci pour avoir pris le temps de ces quelques lignes. Cela me touche…
Magnifique !!! Vous en avez fait un lieu apaisant . On rêverait de pouvoir si poser. Félicitations à vous pour tout ce travail.
Nadia : C’est un lieu très reposant oui… Mais c’était déjà le cas avant mon arrivée. La maison comme la cour était la propriété d’une famille très aimante et cela se sent encore un peu partout…
Merci pour vos mots…